Synthèse de différents bilans atmosphériques et climatiques du mois de mars 2024

  1. A l’échelle de l’hémisphère nord :

A l’échelle de l’hémisphère nord sur le mois entier de mars 2024, on a plus ou moins la continuité du marqueur de l’empreinte atmosphérique El Nino (même si les anomalies de SST positives sur le Pacifique Equatorial se résorbent) sur le continent américain avec dipole bas géopotentiels en allant vers le sud-ouest des USA et hauts géopotentiels en allant vers le nord-est du Canada.

Gros marqueur à l’échelle de l’hémisphère de hauts géopotentiels de la Scandinavie à la mer de Baffin.

Europe de l’ouest sous flux océanique de sud à sud-ouest avec des hauts géopotentiels sur l’Europe du nord-est. Cela a favorisé une douceur parfois forte sur toute l’Europe et des précipitations très abondantes sur l’Europe de l’ouest avec une multiplication par chez nous des épisodes méditerranéens et cévenols ainsi que des afflux de sable saharien.

Les anomalies du courant jet à l’échelle de l’hémisphère sur mars 2024, montrent toujours plutôt une signature atmosphérique El Nino dynamisant un fort courant jet subtropical stationnant sur sud USA/nord Mexique. Le courant jet atlantique a circulé quant à lui bas en latitude sur l’Atlantique s’enfonçant en direction de la Méditerranée et favorisant des dégradations à répétition sur toute l’Europe de l’ouest. Configuration récurrente de doubles jets vers l’Europe centrale favorisant des vagues de douceur/chaleur à répétition. Même récurrence sur l’est du continent américain.

Au final, le bilan atmosphérique montre que la dynamique de géopotentiels plus élevés que la normale aux hautes latitudes, aura favorisé des courants jets actifs aux latitudes moyennes et parfois basses ramenant de l’humidité riche en précipitations sur les USA et l’Europe de l’ouest. Pour autant ce genre de configuration, ne garantit plus encore une fois une réelle prédominance de froid aux latitudes moyennes, les réserves d’air froid étant maintenant très limitées aux hautes latitudes.

. L’EAMT (couple de montagne) et l’AAM (Atmospheric Angular Momentum)

L’AAM aura été positive tout le mois avec un afflux EAMT+ marqué courant du mois ce qui a certainement favorisé une dynamique perturbée aux latitudes moyennes notamment sud-ouest des USA et Europe de l’ouest. Cette AAM+ aura certainement eu une influence sur les géopotentiels plus élevés que la moyenne sur les hautes latitudes. Le décalage de la MJO sur l’hémisphère occidental aura aussi favorisé cette AAM+ et ces géopotentiels plus élevés aux hautes latitudes avec un dernier sursaut d’El Nino à la clé.

Cet indice montre encore une fois qu’il peut être décisif pour anticiper les régimes de temps à l’échelle hémisphérique et surtout la dynamique (méridienne ou zonale).

. L’oscillation nord pacifique (PNA)

Après un début de mois marqué par une PNA-, la PNA+ a pris le relais favorisant des précipitations abondantes sur la Californie, les Rocheuses et est/sud-est des USA. La PNA+ aura aussi favorisé encore une fois des températures bien plus douces que les moyennes.

. L’oscillation nord atlantique (NAO)

L’oscillation nord atlantique nous influence directement plus encore d’octobre à avril. En mode réchauffement climatique, une NAO- en hiver a + le potentiel de nous ramener humidité et froid sans excès que la NAO+ qui devient dans le nouveau paradigme climatique souvent propice à l’anticyclone subtropical sur l’Europe. Sur mars, NAO fluctuante assez neutre avant une plongée plus franche toute fin de mois qui a d’ailleurs été associée à une période de Pâques très agitée, très instable sur l’Europe de l’ouest. La NAO- est plus apte à provoquer un temps agité que la NAO+ en général.

. L’oscillation arctique (AO)

L’oscillation arctique nous influence un peu moins directement. Une AO- a tout de même plutôt dominé ce mois de mars signifiant l’emprise des hauts géopotentiels/hautes pressions sur l’Arctique. Cela a provoqué un Arctique relativement « doux » encore une fois.

. L’oscillation de Madden Julian (MJO)

La MJO aura été très opérante sur mars avec un décalage tout au long du mois de la convection sur l’hémisphère occidental. Cela aura influé sur la dynamique et le placement des centres d’action à l’échelle hémisphérique. Les phases 5-6-7 fort actives, auront par exemple fortement favorisé un temps perturbé sur l’Europe de l’ouest.

. Le phénomène ENSO (El Nino – La Nina)

Perte de vitesse d’El Nino sur mars avec une résorption plus ou moins rapide. La résorption s’opérant plus rapidement près des côtes péruviennes ce qui est normal avec un upwelling (remontée des eaux froides) se mettant en place. Le décalage de la MJO sur l’hémisphère occidental a tout de même ralenti le processus de refroidissement vers la fin de mois mais ceci est temporaire. La neutralité sera atteinte sur le mois d’avril conformément aux prévisions de base avant une bascule sur la Nina durant l’été de l’hémisphère nord.

. La stratosphère

Un réchauffement majeur stratosphérique s’est opéré le 4 mars avec renversement des vents zonaux à 10 hPa. Une reprise des vents zonaux a été observé dès le 26 mars mais à une vitesse relativement limitée.

La diffusion du réchauffement stratosphérique du 4 mars a été très très limitée au niveau de la troposphère pour ainsi dire quasi nulle malgré un peu de NAM- qui s’est légèrement propagée. Influence très très limitée sur l’emplacement des centres d’action, beaucoup plus limitée aussi que l’influence des forçages tropicaux notamment MJO.

Douceur encore une fois largement prédominante sur l’hémisphère nord mais un ton en dessous tout de même de février. Le froid s’est cantonné à la mer de Béring, le centre du Canada, Svalbard et quelque peu le nord de la Sibérie et l’extrême orient russe. Douceur pour ne pas dire chaleur omniprésentes sur l’Europe avec des records. L’est des USA et du Canada ont vu des températures souvent très élevées. Plusieurs records de douceur/chaleur aussi en Chine et sur l’Afrique du nord.

A l’échelle globale, mars 2024 aura été le mois de mars le plus chaud jamais enregistré dans l’ensemble des données ERA5. Source : Zeke Hausfather

Le mois de mars aura été le plus chaud sur Terre. Nous observons un excédent de +0.73°C par rapport à la moyenne 1991-2020, battant de 0.10°C le précédent record de mars 2016, excédent de +1.68°C par rapport à l’ère pré-industrielle, 10ème mois consécutif (depuis juin 2023) à établir un record pour le mois considéré.

La température moyenne mondiale des douze derniers mois (avril 2023 – mars 2024) est la plus élevée jamais enregistrée, à 0,70°C au-dessus de la moyenne 1991-2020 et 1,58°C au-dessus de la moyenne préindustrielle 1850-1900. 

La température moyenne européenne pour mars 2024 était de 2,12 °C supérieure à la moyenne de mars 1991-2020, faisant de ce mois le deuxième mois de mars le plus chaud jamais enregistré sur le continent, avec seulement 0,02 °C de moins qu’en mars 2014. Les températures étaient les plus supérieures à la moyenne en mars 2024. régions du centre et de l’est. 

En dehors de l’Europe, les températures étaient plus élevées que la moyenne dans l’est de l’Amérique du Nord, au Groenland, dans l’est de la Russie, en Amérique centrale, dans certaines parties de l’Amérique du Sud, dans de nombreuses régions d’Afrique, dans le sud de l’Australie et dans certaines parties de l’Antarctique. 

Le phénomène El Niño a continué de s’affaiblir dans l’est du Pacifique équatorial, mais les températures de l’air marin sont généralement restées à un niveau inhabituellement élevé.  

Source : Copernicus

Quelques bilans thermiques supplémentaires de certains pays de l’hémisphère nord :

Source : Patrick Duplessis

Sources : Extreme Temperatures Around The World https://twitter.com/extremetemps

Le bilan thermique des SST (température des eaux de surface) montre une chaleur continuant à être inédite sur tous les bassins très largement devant 2023 et 2022. C’est très marqué sur l’Atlantique Tropical et une bonne partie de l’Océan Indien.

La température moyenne de la surface de la mer en mars entre 60°S et 60°N était de 21,07°C, la valeur mensuelle la plus élevée jamais enregistrée, légèrement au-dessus des 21,06°C enregistrés en février. Source : Copernicus

Source : JMA

2. A l’échelle nationale :

Plus de détails sur : https://meteofrance.fr/sites/meteofrance.fr/files/files/editorial/Bilan_definitif_mars_2024_020424.pdf

Anomalie thermique : +1,6°C

Anomalie pluviométrique : +85%


Commentaires

Une réponse à « Synthèse de différents bilans atmosphériques et climatiques du mois de mars 2024 »

  1. merci c’est vraiment intéressant. Beaucoup d’informations biens sourcées et décortiquée. Ma référence.

    J’aime

Laisser un commentaire