- A l’échelle de l’hémisphère nord :
Bilan atmosphérique au niveau des géopotentiels :



A l’échelle de l’hémisphère nord sur le mois entier de février 2024, on a la continuité du marqueur de l’empreinte atmosphérique El Nino sur le continent américain avec dipole bas géopotentiels en allant vers le sud-ouest des USA et hauts géopotentiels en allant vers le Canada. Europe plutôt sous flux océanique de sud-ouest mais avec forte influence des hauts géopotentiels subtropicaux, favorisant une influence subtropicale tout le mois. Les bas géopotentiels se retranchent franchement au nord de l’Europe.
Anomalies de courant jet :


Les anomalies du courant jet à l’échelle de l’hémisphère sur février 2024, montrent bien la signature atmosphérique El Nino dynamisant un fort courant jet subtropical stationnant sur sud USA et Atlantique remontant sur la France ce qui explique la récurrence des « rivières atmosphériques ». Le courant jet polaire a été aussi dynamique sur le nord de l’Europe. On s’est d’ailleurs parfois retrouvé dans une configuration de double jet favorisant des conditions anticycloniques subtropicales avec des températures très élevées pour la saison.
Au final, le bilan atmosphérique montre que la dynamique de blocage nord américain et que le flux océanique prédominant en Europe s’installant loin jusqu’en Russie, a engendré un mois de février « non hivernal » et totalement hors saison.
Bilan des indices :
. L’EAMT (couple de montagne) et l’AAM (Atmospheric Angular Momentum)


Le couple de montagne via la GWO influence directement en hiver la dynamique atmosphérique à l’échelle de l’hémisphère. Une EAMT+ faisant augmenter l’AAM dans un mode positif, précède un schéma zonal sur l’hémisphère avec un courant jet en forme notamment près de la côte ouest américaine, l’influence est un peu moins nette sur l’Europe avec cependant une probabilité à favoriser l’anticyclone subtropical en mode NAO+. Un fort mode positif AAM+ comme il est apparu 3 fois cet hiver entre fin décembre, fin janvier et mi-fin février, s’il est accompagné par une MJO se déplaçant vers l’hémisphère occidental, favorise ensuite des blocages à haute latitude.
Sur début-mi février, manque de corrélation avec une MJO n’allant pas plus loin que la phase 7 et devenant vite moins opérante avec une AAM+ précédemment. Donc pas de dynamique hivernale réelle à l’échelle hémisphérique.
Sur fin février, l’AAM+ n’a pas été corrélé à une MJO opérante, ce qui n’a pas favorisé de propagation des blocages à haute latitude, cela a au contraire permis la continuité d’un flux océanique avec des hauts géopotentiels en forme souvent influentes.
L’EAMT couplé à l’AAM est un indice très pertinent notamment en hiver.
. L’oscillation nord pacifique (PNA)

L’oscillation nord pacifique (PNA) aura basculé en négatif à l’approche de la fin du mois reflétant le retour de conditions plus froides sur le nord-ouest du continent nord américain. La PNA+ aura tout de même favorisé d’une manière largement dominante la diffusion de conditions douces hors saison.
. L’oscillation nord atlantique (NAO)

L’oscillation nord atlantique nous influence directement plus encore d’octobre à avril. En mode réchauffement climatique, une NAO- en hiver a + le potentiel de nous ramener humidité et froid sans excès que la NAO+ qui devient dans le nouveau paradigme climatique souvent propice à l’anticyclone subtropical sur l’Europe. Sur février, prédominance claire d’une NAO+ favorisant douceur sur le continent européen et conditions perturbées au nord de l’Europe et plus anticycloniques au sud.
. L’oscillation arctique (AO)

L’oscillation arctique nous influence un peu moins directement. Une phase négative a cependant eu lieu entre la première et deuxième décade ce qui a favorisé à ce moment là du froid plus intense sur la Scandinavie et l’ouest de la Russie. Mais le froid ne s’est pas étendu plus au sud.
. L’oscillation de Madden Julian (MJO)


La MJO aura été beaucoup moins opérante sur février par rapport à janvier ce qui aura favorisé un statu quo des conditions douces à très douces aux latitudes moyennes avec une barrière subtropicale parfois haute en latitude. Ce n’est pas un paramètre qui aura été déterminant sur février.
. Le phénomène ENSO (El Nino – La Nina)
El Nino qui se traduit par des anomalies de températures fortement positives sur le Pacifique Equatorial, a commencé à s’essouffler petit à petit dès le mois de janvier avec un refroidissement net des eaux près des côtes péruviennes, prémice d’une transition vers une phase neutre durant le printemps à venir. En terme atmosphérique, nul doute que cet El Nino fort mais un ton en dessous en terme d’activité que celui de 1997-1998 et 2015-2016, aura eu un effet en favorisant notamment l’extension du courant jet pacifique par séquence près du continent américain avec un jet subtropical assez fort. Influence beaucoup beaucoup moins nette sur l’Europe par contre ce qui est normal. Il a toujours été clair qu’ENSO a une influence très limitée en Europe. Du moins c’est une influence indirecte surtout si ENSO+ est couplée avec une EAMT+ (extension du courant jet pacifique) et une MJO se transférant dans l’hémisphère occidental.

El Nino va s’effacer durant le mois de mars pour arriver à une phase neutre sur avril.
. La stratosphère

Le mois de février aura vu un réchauffement stratosphérique mais non majeur avec le renversement des vents zonaux à 10 hPa évité de peu. Le vortex polaire stratosphérique a connu les montagnes russes, forte activité au début de mois puis activité faible mais que reprise assez nette des vents zonaux suite au réchauffement stratosphérique.

L’indice NAM reflétant les transferts de flux de chaleur entre troposphère et stratosphère ainsi que de stratosphère-troposphère, montre une activité de NAM- présente sur la deuxième décade de février couplée à une oscillation arctique négative traduisant les transferts de flux de chaleur. La diffusion à la troposphère du flux de chaleur a tout juste favorisé du froid plus présent entre Scandinavie et l’ouest de la Russie, et un refroidissement passager sur les USA sachant qu’on partait de très haut.
Bilan thermique :

Douceur hors saison très largement prédominante aux USA/Canada et Europe. De nombreux records ont été battus. Le froid n’a pu se cantonner par période que sur la Scandinavie et un peu la Sibérie du sud et l’extrême orient. De même légère anomalie négative entre Yukon et Colombie Britannique. L’Arctique a également surchauffé notamment côté Sibérie. Un mois de février sortant clairement du cadre de l’hiver aux latitudes moyennes du continent nord américain et en Europe. A noter aussi des températures souvent élevées sur l’Afrique du nord et de l’ouest, et dans l’ouest de l’Australie, tout cela avec des records à la clé.

A l’échelle globale, février 2024 aura été le mois de février le plus chaud jamais enregistré dans l’ensemble des données JRA-55, à 1,79°C au-dessus des niveaux préindustriels. Il a battu le record précédent de 2016 (lors du super El Nino cette année-là) d’environ 0,12 °C. Source : Zeke Hausfather

Février 2024 a été le mois de février le plus chaud jamais enregistré à l’échelle mondiale, avec une température moyenne de l’air en surface ERA5 de 13,54°C, soit 0,81°C au-dessus de la moyenne 1991-2020 pour février et 0,12°C au-dessus de la température du mois de février le plus chaud précédent, en 2016. C’est le neuvième mois consécutif qui est le plus chaud jamais enregistré pour le mois respectif de l’année. Le mois a été 1,77°C plus chaud que la moyenne estimée de février pour 1850-1900, la période de référence préindustrielle désignée. La température moyenne mondiale au cours des douze derniers mois (mars 2023 – février 2024) est la plus élevée jamais enregistrée, à 0,68°C au-dessus de la moyenne 1991-2020 et 1,56°C au-dessus de la moyenne préindustrielle 1850-1900. La température mondiale quotidienne a été exceptionnellement élevée au cours de la première moitié du mois, atteignant 2°C au-dessus des niveaux de 1850-1900 pendant quatre jours consécutifs (du 8 au 11 février).

Les températures européennes en février 2024 étaient de 3,30°C supérieures à la moyenne de février 1991-2020, avec des températures bien supérieures à la moyenne en Europe centrale et orientale. En dehors de l’Europe, les températures étaient supérieures à la moyenne dans le nord de la Sibérie, le centre et le nord-ouest de l’Amérique du Nord, la majorité de l’Amérique du Sud, l’Afrique et l’ouest de l’Australie. Le phénomène El Niño a continué de s’affaiblir dans le Pacifique équatorial, mais les températures de l’air marin sont généralement restées à un niveau inhabituellement élevé.
Source : Copernicus
Quelques bilans thermiques supplémentaires de certains pays de l’hémisphère nord :

Source : Patrick Duplessis


Février 2024 a été le 4ème mois de février le plus chaud depuis 1895 aux USA selon les données climatiques de Prism. Environ un quart des États-Unis ont enregistré un mois de février parmi les 5 plus chauds et plus de la moitié ont eu un mois de février parmi les 10 les plus chauds.
Source : Brian Brettschneider

L’Autriche a vécu le mois de février le plus chaud de son histoire et de loin.
Sources : Extreme Temperatures Around The World https://twitter.com/extremetemps

Le bilan thermique des SST (température des eaux de surface) montre une chaleur continuant à être inédite sur tous les bassins très largement devant 2023 et 2022. C’est très marqué sur l’Atlantique Tropical et une bonne partie de l’Océan Indien.
Bilan pluviométrique :

Source : JMA
(Carte temporaire avant d’avoir à disposition le vrai bilan pluviométrique mondial sur le mois de février)
2. A l’échelle nationale :
Bilan climatique national :




Plus de détails sur : https://meteofrance.fr/sites/meteofrance.fr/files/files/editorial/Bilan_definitif_fevrier_2024_07032024.pdf
Anomalie thermique : +3,5°C
Anomalie pluviométrique : +50%
Laisser un commentaire